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12/11/1993 - 23/12/1993

Sentinelle impuissante

Oh, je voudrais que tu t'en ailles
Pour me protéger des harpons.
Sans ton bouclier de ferraille
Je pourrais oublier ton nom.

Mais ton ombre me laisse nu,
Mon corps explosé à ces flèches
Qui mitraillent mes festins nus
Que ton aride sang assèche.

Comment oublier ta présence,
Toi, qui dévores mes jours et nuits ?
Lorsque dans mes draps tu t'élances,
Quand dans tes bras je m'assoupis.

Compagne de tous mes dialogues,
J'enrage de n'être muet,
Lorsque ta voix aphone vogue
Sur tes silences de déchets.

12/11/93

Stabilité mise à pied

Jamais l'on ne m'a été plus fidèle
Jamais l'on ne m'a si longtemps bercé
Quand loups et chiots s'en vont à tire d'aile,
Toi tu accours auprès de ma nausée.

Jamais tu ne m'as gradé de rancoeur,
Lorsque je fuyais tes pas approchants,
Lorsque j'allais chercher une âme soeur
Pour éviter ton regard dérangeant.

Pourtant, c'est ta présence que je fuis,
Et ta compagnie que je licencie.

12/11/93

Salope caritative

Et la beauté des clochards célestes
N'a plus rien à envier à ton feu,
Qui brûle d'une flamme indigeste
Sous ta robe tachetée de bleu.

Pauvre fille triste en mal de sexe,
Tu viens soûler les esprits du spleen,
Avec ton cul chaud et circonflexe,
Tu accueilles les âmes chagrines.

Putain des loups exclus de leur bande,
Tu te délectes quand tu les vois,
Quand, seuls, abandonnés, ils attendent,
La truffe mouillée, l'oeil aux abois.

Mais, jamais rassasiée, tu rejoins
Les zombies en marge du comptoir,
Où ils égrènent leurs coeurs de foin,
Qui fondent dans ton four crématoire.

13/11/93

Sourire ombragé

Tes lèvres au goût des gerçures d'hiver,
Dévoil'nt le soleil glacé de la nuit,
Sourire ombragé que tu interfères,
Quand la pitié glane chez mes esprits.

23/11/93

Soeur persistante

Ô ma soeur, ma vraie soeur, mon unique jumelle,
Toi qui t'es endormie dans le même berceau,
Celui que j'occupais, toi qui me tenait chaud,
Déjà en ce temps-là, et sans que je t'appelle,

Ô toi, la compagne de mon enfance, celle
Qui venait dans mes jeux, volant tous mes cadeaux,
Jouant tous les rôles, usurpant mes héros,
Prenant mes répliques dans mes films parallèles ;

J'écris en ce moment notre intime mariage
Entre ces quatre murs qu'au travers tous les âges
Nous avons décorés ; car quand viendra la fin,

Lorsque tous seront loin, flanqués du noir du deuil,
Lorsque mon dernier toit sera fait de sapin,
Toi encor, tu seras couchée dans mon cercueil.

23/11/93

Simple charogne

Monstre difforme de taille inconnue,
Couchant avec toutes les âmes nues,
Celles qui ont perdu leur carapace,
Tu te glisses comme un frisson salace
Entre les plaies offertes à ton oeil.

Et chaque écorché te connaît par coeur,
Car tu fus la première à arriver
Auprès de sa dépouille calcinée,
Sombre charogne assoiffée de malheur
Dont tu franchis chaque journée le seuil.

Immortelle douée d'ubiquité,
Tu rodes autour de moi pour sauter
Sur le premier neurone handicapé.

24/11/93

Sorcière adorée

Ne crois pas que je te haïsse !
Tu m'as déjà tant inspiré.
Lorsque sur tes côtes je glisse
Ma main, tes côtes dénudées,
Des soupirs repus me remplissent.

Ma Muse, ma seconde Plume,
Tes flancs soyeux m'ont tant offert :
Mirages émergeant des brumes,
Visages de neige couverts,
Et images perlées d'écume.

Je ne peux te haïr ma douce,
Malgré tes éclairs déchirants,
Car, pour toutes les lunes rousses
Que tu m'as montrées dans les vents,
Je te serai reconnaissant.

Pour tous ces déserts magnifiques
Que tu m'as dessinés souvent,
Je ne garderai que l'unique
Parfum de leurs soleils couchants :
Ton souvenir reste idyllique.

29/11/93

Signes de vie

Il y a une étoile au paradis
Que tu ne connais pas !
Il y a un point dans le labyrinthe
Que tu n'atteindras pas.

Je les protégerai de tes envies,
Et les éloignerai de tes étreintes.

01/12/93

Sempiternelle présence

À la fin,
Tu seras là,
Seule...
Comment peux-tu être seule,
Toi, la compagne des solitaires ?
Quand je serai là,
Dans le désert ravagé,
Qui annonce la fin,
Tu te tiendras devant moi,
Seule...
Mais comment peux-tu te retrouver seule,
Toi, la fiancée des coeurs solitaires ?
Quand je resterai,
Avec mes os et mon sang,
Pour seules couvertures,
Avec mes yeux et mes lèvres,
Comme seule devanture,
Tu seras plantée là,
Seule...
Mais comment peux-tu rester seule,
Toi, la confidente des voix de l'oubli ?

04/12/93

Sirène d'échange

Des yeux de porcelaine me regardent ;
Hélas ce ne sont que les tiens !
Un chant me parvient d'une voix de barde ;
Mais tu restes mon seul refrain !
Et ces mains de satin qui me caressent,
J'aurais aimé qu'elles soient celles
D'une autre, d'une autre que toi !
J'ai tellement rêvé d'une autre tendresse,
Que lorsqu'au bout d'une nuit étincelle
Ton regard de feu si narquois,
Je tuerais ta présence omniprésente,
En attendant la fin de mes attentes.

04/12/93

Sexuelle randonnée

Non, je ne suis pas ton amant ;
C'est une erreur qu'on faite
Ceux qui te voyaient trop souvent,
Sans jamais t'aimer d'une miette.

Et toi tu n'es pas mon amie ;
Je me passe de l'amitié
Que tu peux offrir à ma vie,
Si jamais tu savais donner.

05/12/93

Souhaits contrariés

Compagne de mes désirs contrariés,
Pourquoi viens-tu quand je veux te chasser ?
Pourquoi sais-tu si bien te faire attendre,
Quand je ne fais rien d'autre que t'attendre ?

05/12/93

Solitarophobie

Je te retrouve toujours sur l'oreiller de l'aube,
Étendue, langoureuse, et rêvant de rester
Coincée entre mes draps de solitarophobe.

05/12/93

Stylet crucifié

Qui d'autre que toi me tient la main ?
Qui d'autre que toi se promène,
Avec mon ombre, comme un bon chien,
Suivant ma peau, mes pas et mes peines ?

Qui d'autre que toi écrit mes mots ?
Qui d'autre que toi guide ma plume,
Entre les ravins creux de mes maux,
Et les feux que les lunes allument ?

Qui d'autre que toi entend mes vers ?
Qui d'autre que toi entend les rimes,
Que déverse mon coeur entrouvert,
Sur mes pics gris et mes bleus abîmes ?

Qui d'autre que toi aime l'amour
Qui sommeille derrière mes yeux,
Qui bourdonne d'un grondement sourd,
Avant d'exploser au cul des dieux ?

11/12/93

Stigmates

Autour de toi...
Rien...
Le silence, le vide...
Avec à l'intérieur,
Un soupçon de néant,
Pour meubler tes interstices.

12/12/93

Silver argenté

Je t'aime.
Quand les chevaux dansent sur la mer,
Quand tes cheveux crient leur transparence,
Et qu'ils m'enroulent dans cette danse,
Où sous le charme je m'laisse faire,
Je t'aime.

Je t'aime.
Pour tes yeux qui s'ouvrent sur la nuit,
Pour ton soleil qui couvre mes heurts,
Pour ces moments où je te maudis,
D'être ma soeur, mon diable et mon coeur,
Je t'aime.

12/12/93

Sacrifice

Voudrais-tu mourir pour moi ?
Moi, je le ferais,
pour toi.
À cause de toi,
Je le ferais.

Et si les loups devaient nous séparer,
Avec leurs crocs embrillés de salive,
Je trouverais un coeur où te cacher,
Pour faire que même notre mort vive.

13/12/93

Souvenirs nuancés

Je me souviens de chacun de tes prénoms :
Tu es Aurore et Crépuscule à la fois,
Tu es Neige blanche et Soleil de charbon,
Matin tu es Bergère et soir tu es Roi.
Je te reconnaîtrais partout où tu erres :
Parmi les cigales j'entendrais ton cri,
Dans le silence des forêts, sous la mer,
Je cueillerais la fleur dont tu es le fruit.
Je sais la couleur de tes yeux éteints,
La saveur fruitée de tes lèvres d'orange,
Et l'odeur même de tes baisers sans fin,
Lorsque mes doigts croisent tes tendres phalanges.
Je connais le visage que tu auras
Lorsque la nuit aura dit son dernier mot,
Lorsque tu ne désireras plus de moi,
Que je me glisse enfin libre sous ta peau.
Tu es mon coeur, tu souffles dans mes branchies,
Je serai ton âme et tu restes ma vie.

21/12/93

Séquentialité des chemins non balisés

Mais où me mèneras-tu
Accroché à cette étoile ?
Le corps de la nuit est nu
Et nos jours restent dédales.
Notre voyage est sans fin,
Et notre cause sans but,
Nous errons sans lendemain,
Dans cette vie en volutes.

21/12/93

Siège éjectable

Berceau de la création,
Tu es le miroir indispensable,
Pour pouvoir s'extraire du décor,
Pour être nu,
Seul...
Sans artifice, ni sentiment déguisé.

21/12/93

Solitude

J'ai un carnet pour abriter mes mots,
Et une plume pour les peindre en bleu,
Des cordes pour vibrer mon lamento,
Et j'ai une voix pour cracher mon feu,
Et je t'ai toi : ma Solitude...
J'ai un coeur pour y fourrer mes désirs,
Et une plume pour les peindre en bleu,
Des rires pour évacuer mes délires,
Et j'ai au fond de moi ce foutu "je",
Et je t'ai toi : ma Solitude...
J'ai un oreiller pour poser mes rêves,
Et une plume pour les raviver,
Des baisers pour mon soleil qui se lève,
Et deux lunes pour me faire rêver,
Et je t'ai toi : ma Solitude...
J'ai la satané chance des cocus
Pour franchir les fleuves sans me noyer,
Et les sourires moqueurs des pendus
Pour briser la Faux sans couper le blé,
Et je t'ai toi : ma Solitude...
Et j'ai de la musique plein les veines,
Et du sang pour la regarder couler,
Et j'ai les yeux crevés par les sirènes,
Et un anévrisme qui a poussé
Au milieu de mes globules cardiaques,
Et cette solitude démoniaque.

23/12/93

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